rationalité et/ou passion dans l'anarchisme ?
4 participants
Page 1 sur 1
rationalité et/ou passion dans l'anarchisme ?
(Je poste ça dans la section philo du forum car les ramifications de la question que je m'apprête à vous poser peuvent éventuellement se prolonger dans la philosophie)
Il s'agit d'une série de questions naïves qui me trottent dans la tête depuis plusieurs années. Il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses selon moi, il ne s'agit que d'une question de sensibilité personnelle.
D'après vous, l'anarchisme doit-il plutôt verser dans le rationnel, et, suivant, dans la manie de l'organisation, dans les mouvements, dans les syndicats, ou bien doit-il plutôt se situer du côté de la passion, de l'irrationnel, de la révolte, et peut-être même dans l'éclatement ? Est-il possible de concilier les deux approches ? Est-ce souhaitable, ou bien faut-il savoir se placer de manière définitive ?
Je me lance dans la réflexion "tout venant", pêle-mêle, car je n'ai pas de théorie personnelle à ce sujet...
Déjà, les écueils. La rationalité, en matière révolutionnaire, a toujours mené historiquement à l'organisationite aïgue, à l'auto-discipline et à l'éventualité de modérer largement l'élan de révolte qui caractérise tout révolutionnaire. Il n'est pas rare de constater que d'anciens anarchistes ayant passés de nombreuses années dans les structures syndicales - organisations permanentes, peu ou pas dynamiques et relativement centralisées - terminent leur jours à sucrer les fraises dans les rangs des réformistes.
A l'opposé, l'individualisme isoliste qui guette le révolutionnaire ne se laissant guider que par sa passion et sa puissance, peut le faire échouer dans toutes ses entreprises d'association libre, même temporaires, avec ses semblables. Voyez comment a terminé ce pauvre Coeurderoy, pourtant si pétri d'idéal.
Cette tension entre rationalité et passion me rappelle aussi l'importante différence de style entre Proudhon, le "computer" froid et rationnel - mais ô combien efficace et positif - d'un côté et, de l'autre, Déjacque et Coeurderoy, les enfiévrés, appelant la barbarie de l'en-dehors de leurs voeux.
Comme je n'arrive jamais vraiment à trancher dans le vif et que je suis intimement convaincu que l'anarchie n'a à voir qu'avec le temporaire et le dynamique, je me dis qu'il doit certainement y avoir un temps pour tout, de la réflexion théorique la plus abstraite à l'explosion des puissances.
Cependant, concevoir un tel partage du temps de vie du militant anarchiste moyen suppose déjà de savoir à l'avance quand il est bon de raisonner dans le cadre de l'auto-discipline et quand il est bon de laisser libre court à sa passion. Ceci constitue déjà en soi une manière de rationaliser dans le vide, de canaliser la révolte : le raisonnement se mord la queue.
J'espère que vos témoignages personnels m'aideront à y voir plus clair. J'ai conscience qu'il s'agit purement de branlette intellectuelle mais en ce moment j'ai le temps, je suis déjà en vacances depuis hier
Il s'agit d'une série de questions naïves qui me trottent dans la tête depuis plusieurs années. Il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses selon moi, il ne s'agit que d'une question de sensibilité personnelle.
D'après vous, l'anarchisme doit-il plutôt verser dans le rationnel, et, suivant, dans la manie de l'organisation, dans les mouvements, dans les syndicats, ou bien doit-il plutôt se situer du côté de la passion, de l'irrationnel, de la révolte, et peut-être même dans l'éclatement ? Est-il possible de concilier les deux approches ? Est-ce souhaitable, ou bien faut-il savoir se placer de manière définitive ?
Je me lance dans la réflexion "tout venant", pêle-mêle, car je n'ai pas de théorie personnelle à ce sujet...
Déjà, les écueils. La rationalité, en matière révolutionnaire, a toujours mené historiquement à l'organisationite aïgue, à l'auto-discipline et à l'éventualité de modérer largement l'élan de révolte qui caractérise tout révolutionnaire. Il n'est pas rare de constater que d'anciens anarchistes ayant passés de nombreuses années dans les structures syndicales - organisations permanentes, peu ou pas dynamiques et relativement centralisées - terminent leur jours à sucrer les fraises dans les rangs des réformistes.
A l'opposé, l'individualisme isoliste qui guette le révolutionnaire ne se laissant guider que par sa passion et sa puissance, peut le faire échouer dans toutes ses entreprises d'association libre, même temporaires, avec ses semblables. Voyez comment a terminé ce pauvre Coeurderoy, pourtant si pétri d'idéal.
Cette tension entre rationalité et passion me rappelle aussi l'importante différence de style entre Proudhon, le "computer" froid et rationnel - mais ô combien efficace et positif - d'un côté et, de l'autre, Déjacque et Coeurderoy, les enfiévrés, appelant la barbarie de l'en-dehors de leurs voeux.
Comme je n'arrive jamais vraiment à trancher dans le vif et que je suis intimement convaincu que l'anarchie n'a à voir qu'avec le temporaire et le dynamique, je me dis qu'il doit certainement y avoir un temps pour tout, de la réflexion théorique la plus abstraite à l'explosion des puissances.
Cependant, concevoir un tel partage du temps de vie du militant anarchiste moyen suppose déjà de savoir à l'avance quand il est bon de raisonner dans le cadre de l'auto-discipline et quand il est bon de laisser libre court à sa passion. Ceci constitue déjà en soi une manière de rationaliser dans le vide, de canaliser la révolte : le raisonnement se mord la queue.
J'espère que vos témoignages personnels m'aideront à y voir plus clair. J'ai conscience qu'il s'agit purement de branlette intellectuelle mais en ce moment j'ai le temps, je suis déjà en vacances depuis hier
gdpuvrouls otemctrsqmju- Colleur d'affiches
- Nombre de messages : 24
Opinions politiques : ---
Re: rationalité et/ou passion dans l'anarchisme ?
Proudhon froid et rationnel ? Ce n'est pas Blanqui ?Cette tension entre rationalité et passion me rappelle aussi
l'importante différence de style entre Proudhon, le "computer" froid et
rationnel - mais ô combien efficace et positif - d'un côté et, de
l'autre
Révolte- Idéologue
- Nombre de messages : 4918
Age : 36
Opinions politiques : ...
Activité politique : ...
Re: rationalité et/ou passion dans l'anarchisme ?
Blanqui aussi !
Proudhon était un grand amateur de l'ordre ordonné, fondamentalement opposé aux techniques de luttes sociales telles que les grèves, les manifestations et le sabotage. Pour rien au monde il n'aurait pris un fusil pour s'en servir sur une barricade. Ce n'était tout simplement pas dans son tempérament.
Ses écrits sur 1848 diffèrent radicalement de ceux de Bakounine en cela qu'il déteste l'agitation. Là où le russe parlait volontiers de griserie révolutionnaire, lui s'interrogeait encore et toujours sur les aspects théoriques de la révolution et sur la meilleure stratégie de la développer.
Et puis le reste de ses essais montrent - pour ce que j'en ai lu - une méthode d'analyse rationnelle et parfois presque scientiste qui tranchent quand on les compare avec les autres oeuvres anarchistes de l'époque. J'ai cité Déjacque et Coeurderoy plus haut en guise d'exemple.
Il était de plus relativement asexué et se méfiait fortement des passions amoureuses
Proudhon était un grand amateur de l'ordre ordonné, fondamentalement opposé aux techniques de luttes sociales telles que les grèves, les manifestations et le sabotage. Pour rien au monde il n'aurait pris un fusil pour s'en servir sur une barricade. Ce n'était tout simplement pas dans son tempérament.
Ses écrits sur 1848 diffèrent radicalement de ceux de Bakounine en cela qu'il déteste l'agitation. Là où le russe parlait volontiers de griserie révolutionnaire, lui s'interrogeait encore et toujours sur les aspects théoriques de la révolution et sur la meilleure stratégie de la développer.
Et puis le reste de ses essais montrent - pour ce que j'en ai lu - une méthode d'analyse rationnelle et parfois presque scientiste qui tranchent quand on les compare avec les autres oeuvres anarchistes de l'époque. J'ai cité Déjacque et Coeurderoy plus haut en guise d'exemple.
Il était de plus relativement asexué et se méfiait fortement des passions amoureuses
gdpuvrouls otemctrsqmju- Colleur d'affiches
- Nombre de messages : 24
Opinions politiques : ---
Re: rationalité et/ou passion dans l'anarchisme ?
Tout anarchiste devrait être hégélien.
Windreaver- Orateur
- Nombre de messages : 132
Opinions politiques : Marxiste-Léniniste-Maoïste
Re: rationalité et/ou passion dans l'anarchisme ?
Salut Windreaver,
pourrais-tu développer un peu s'il te plais (enfin si ça ne te fait pas trop chier quoi), juste pour ma gouverne personnelle ? Comme je n'ai pas d'idées arrêtées sur le sujet, toute piste de réflexion est bonne à prendre
pourrais-tu développer un peu s'il te plais (enfin si ça ne te fait pas trop chier quoi), juste pour ma gouverne personnelle ? Comme je n'ai pas d'idées arrêtées sur le sujet, toute piste de réflexion est bonne à prendre
gdpuvrouls otemctrsqmju- Colleur d'affiches
- Nombre de messages : 24
Opinions politiques : ---
Re: rationalité et/ou passion dans l'anarchisme ?
A priori l'anarchisme ne peut pas être hégélien puisque - selon Proudhon en tout cas - il n'y a pas de fin.
aoxomoxoa- Démago
- Nombre de messages : 297
Opinions politiques : ---
Activité politique : ---
Sujets similaires
» Le photon est-il hors du temps ?
» Le cerveau dans une cuve
» La place de EELV dans la politique
» Pour ne pas parler dans le vide!
» Le cerveau dans une cuve
» La place de EELV dans la politique
» Pour ne pas parler dans le vide!
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum